Yvette DUVAL

Yvette Duval est née en 1930 près de Vire. Pendant la guerre, elle est scolarisée dans une école située près de l’hôpital. L’année de son certificat d’études, elle côtoie Dora Augier et assiste à son arrestation en pleine classe. Après avoir quitté Vire en 1947, elle n’a jamais su ce qu’était devenue la jeune fille. Soixante dix ans après, elle nous livre un témoignage unique, qui permet de s’approcher au plus près de cet évènement.

Je me souviens très bien de Dora. C’était une grande jeune fille, menue, souriante… Nous étions ensemble à l’école située rue Emile Desvaux ; la directrice était Mme Norgeot. A cette époque, j’habitais avec mes parents à Vaudry et chaque jour j’allais à l’école à pieds comme toutes les autres. Je crois que toutes les filles de Neuville montaient à l’école rue du Haut Chemin. On ne savait pas que Dora était polonaise et encore moins qu’elle était juive… Je ne l’ai jamais vue non plus avec une étoile jaune… Elle nous avait toutefois expliqué que ses parents (1) avaient été arrêtés. Elle racontait aussi que certains de ses voisins à Neuville étaient méchants avec elle.
Un jour (2), les Allemands sont venues la chercher en classe. Notre institutrice, Mme Meslier, a refusé de désigner Dora. C’est elle finalement qui s’est levée et qui est sortie avec les soldats. Tout s’est passé très vite, dans le calme… sans violence. On n’a jamais eu de nouvelles de Dora. Nous étions des enfants et nous étions dépassés par le contexte de la guerre… Je me souviens qu’au patronage, le jeudi, sœur Sainte Agnès nous faisait chanter la Marseillaise en chuchotant ! Après le départ de Dora, la vie a repris son cours…
J’ai été très émue d’apprendre récemment sa mort en déportation. Je vois encore très bien son image…

1. Sa mère et son frère Raphaël en juillet 1942.
2. Le 22 octobre 1943.